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| Sujet: [Conte] Un paysan trop bavard. Lun 16 Juil 2012, 14:39 | |
| Un Paysan trop bavard
Il était une fois dans l'Oasis du Sel, à l'ouest du royaume d'Égypte, un paysan nommé Kouéninpou. Il avait une femme, Méret, il avait trois enfants et il avait des ânes sur lesquels il chargeait les produits du pays pour aller les vendre au loin, dans la vallée du Nil. -Hé ! Ma femme, dit-il un jour, je m'en vais en Égypte chercher des provisions pour les enfants. Va dans le grenier mesurer l'orge qui nous reste de l'an passé. Elle y alla aussitôt et compta vingt-six boisseaux d'orge. C'était tout ce qu'il leur restait. - Garde vingt boisseaux pour te nourrir, toi et les enfants, décida le paysan. Avec les six autres, prépare-moi du pain et de la bière que je puisse manger et boire pendant mon voyage ! N'oublie pas l'eau car la route sera longue pour mes bêtes comme pour moi. Tandis que Méret préparait nourriture et boissons, le paysan chargea ses ânes de bottes de roseaux et de souchets, de sel de natron, de bois d'Ianou et de bâtons de genévrier, de peaux de panthère, de fourrures de chacal, de pierres Ânou, de plantes Ténem, de graines de roquette, de pigeons, d'oiseaux rares et de tous les meilleurs produit de l'Oasis du Sel.
Quand tout fut prêt, Kouéninpou embrassa tendrement sa femme, ses enfants et se mit en route pour le sud. Il mena si bien ses ânes sur la piste du désert qu'il arriva, quelques jours plus tard, au bord du Nil. Là, debout sur le rivage, non loin de l'embarcadère, un homme, Nemtynakht attendait on ne sait quoi. Il travaillait pour Rensi, le Grand Intendant des Domaines royaux. Dès qu'il aperçut le paysan et ses ânes lourdement chargés, l'homme se dit en son cœur : - Hum ! Voilà de bien grandes merveilles ! Si seulement je pouvais m'emparer de ces belles marchandises par quelques moyens magiques, par tous les moyens possibles... Voyons je pourrais...
Or, la maison de Nemtynakht se dressait tout près de là, au bord du chemin longeant le Nil. En cet endroit, le sentier était étroit, coincé entre l'eau du fleuve d'un côté et un champ d'orge de l'autre. En fait, ce passage ne mesurant guère plus que la largeur d'une pièce d'étoffe, le paysan fut obligé de mettre ses bêtes à la queue leu leu, ce qui lui prit un peu de temps, car ses ânes étaient têtus. Nemtynakht en profita pour réaliser son horrible projet. - Cours chercher un drap à la maison, ordonna-t-il à son serviteur. Dès qu'il l'eut en main, Nemtynakht l'étendit sur le sol en travers du chemin, l'un des côtés du tissu touchait l'eau et l'autre le champ. Kouéninpou et ses ânes trottinants arrivèrent alors. - Attention paysan ! menaça Nemtynakht. As-tu l'intention de marcher sur mon linge ? - Je ferai ce qui te plaît, mais je suis sur la bonne route, répondit l'oasien tout en encourageant ses ânes. Ne crains rien, je n'abîmerai pas ta lessive qui sèche là. Je peux passer à côté. Et il dirigea l'âne de tête vers le bord du champ. - Paysan ! Mon orge va-t-elle te servir de route ? prosterna Nemtynakht. - Il faut bien que je passe quelque part. Ce chemin étroit est en partie sous l'orge et tu l'encombres avec tes tissus, fit remarquer Kouéninpou. Que puis-je faire ? Veux-tu donc m'empêcher de passer ? Tandis qu'il parlait, l'un de ses ânes s'arrêta, allongea le cou et arracha goulûment une belle touffe d'orge, puis une seconde. - Hé ! Regarde donc ! Rugit Nemtynakht. Puisque ton âne broute mon orge, je vais te le prendre pour compenser les dégâts causés. Dès demain, il travaillera pour moi. Il foulera mes grains. - Non, tu ne prendras pas mon âne pour une malheureuse bouchée d'orge ! Sais-tu que je connais le maître de ce champ ? Il appartient à Rensi, le Grand Intendant des Domaines royaux, qui juge et punit les voleurs dans la région. Et je serais volé sur son domaine ? Ah non. - Eh ! Quand je te parle, tu penses au Grand Intendant. Tu vas voir... Cela dit, Nemtynakht arracha brutalement une branche de tamaris qui poussait tout près de là et se mit à battre le paysan. Il le frappa, frappa encore. Puis, satisfait de l'avoir puni à sa guise, il l'abandonna sur le chemin et partit avec ses ânes. Kouéninpou pleura très fort et cria bien haut à cause des coups et du vol. - Silence, oasien ! menaça de loin le voleur. Prends garde, un mot de plus et tu es un homme mort. - Tu me bats, tu me voles et tu veux que je me taise ! Ô Osiris, Maître du Silence, qu'il me rende mes biens et je cesserai de crier. Sans prendre la peine de lui répondre, Nemtynakht disparut avec ses ânes et toutes ses belles marchandises. Pendant quelque temps, Kouéninpou resta là sur l'étroit chemin, entre l'eau du fleuve et le champ d'orge. Il pleura, cria, réclama ses biens, tempêta près de la maison de Nemtynakht qui ne fit même pas attention à lui. Plaintes, injures, menaces. Rien n'y fit.
Alors, au matin du dixième jour, le paysan reprit la route du sud. Il marcha jusqu'à la ville. Il voulait se plaindre au Grand Intendant qui, par chance, sortait de chez lui pour embarquer sur un bateau lorsqu'il arriva. - Ah ! Seigneur ! Qu'il me soit permis de vous exposer mon affaire, lui dit le malheureux Kouéninpou. Envoyez-moi, je vous prie, un de vos hommes de confiance pour que je lui conte ma mésaventure et il vous expliquera tout. - Va voir ce qu'il veut, ordonna Rensi à l'un de ses hommes. Dépêche-toi car je vais au palais où le roi m'attend. Après avoir patiemment écouté le paysan, le serviteur rejoignit le Grand Intendant et lui répéta l'affaire. - Connaissez-vous ce Nemtynakht ? demande Rensi aux notables qui l'accompagnaient. - Maître, sait-on seulement si c'est bien lui qui vola les ânes de cet oasien ? répondit l'un d'eux. Un de ses serviteurs a, peut-être, agi ainsi à son insu ? Et puis, rien ne prouve que ce paysan avait des marchandises ni même des ânes. - Ou bien il a vendu ses provisions à un autre que Nemtynakht qui l'a puni, ajouta un autre notable. Pour quelques coups de bâton, des ânes et un peu de sel de natron, punirez-vous Nemtynakht qui travaille pour vous depuis des années ? - Ordonnez-lui simplement de rendre ce qu'il a pris et, si cela est vrai, il le fera ! conclut un troisième. Cependant, le Grand Intendant Rensi connu pour sa sagesse ne répondit ni à ses notables, ni au paysan. Il réfléchit calmement en gagnant le rivage. - Allons, nous verrons cela à mon retour. Il est temps d'embarquer. Pharaon ne doit pas attendre. - Grand Intendant, mon Maître ! insista Kouéninpou en approchant du bateau. Vous qui êtes Grand parmi les Grands. Vous qui naviguez sur un bateau de Pharaon. Vous qui êtes un père pour l'orphelin, un mari pour la veuve, un frère pour la femme répudiée, un vêtement pour celui qui n'a plus de mère. Ô mon Maître, anéantissez le mensonge, laissez venir la vérité, terrassez le mal, rendez moi justice ! Ordonnez que l'on me redonne mes ânes et mes marchandises ! Aidez moi car j'ai tout perdu. Comme il se rendait chez Pharaon, le Grand Intendant était si pressé qu'il ne lui répondit pas. Bientôt son navire s'éloigna. Seul sur la rive, l'éloquent Kouéninpou plaida sa cause tant qu'il pensait être entendu.
- Majesté, raconta Rensi à Pharaon peu après son arrivée au palais. Juste avant d'embarquer, la plainte d'un paysan fort bavard, un beau parleur en vérité, m'a intéressé, m'a amusé, plus encore m'a ému. Il prétend avoir été volé par un homme qui est à mon service et me demande de lui rendre justice ! Il est si drôle d'écouter les belles phrases de cet oasien que ce serait un amusement pour sa Majesté que de l'entendre. - Mon ami, quelle excellente idée ! Pour que je conserve bonne santé et belle humeur, laisse discourir ton paysan le plus longtemps possible, puisqu'il parle si bien. Que ton scribe note ses propos et vienne me les lire. Cela me distraira. Et toi, Rensi, garde le silence. - Majesté, je ne l'interromprai pas. Je ne répondrai pas, promit le Grand Intendant. - Fort bien ! Cependant, comme cela durera, je l'espère, un long moment, j'exige que sa femme et ses enfants soient nourris pendant ce temps-là. Je sais que les oasiens ne viennent dans la vallée que lorsque leur maison est vide : il n'y a certainement plus rien à manger chez eux ! - Oui, Majesté. - Occupe-toi aussi de ton paysan. Qu'on lui donne des provisions discrètement et sans qu'il sache qui le nourrit. - Bien entendu, Majesté. Je m'en occupe immédiatement. Ainsi fut fait.
À partir de ce jour, Kouéninpou reçut par « charité » dix pains et deux cruches de bière quotidiennement. Tandis que, loin de là, le gouverneur de l'Oasis du Sel fit apporter trois boisseaux d'orge chaque matin à sa famille sans donner aucune explication. Après avoir réglé avec Sa Majesté le roi les différentes affaires qui l'avaient amené au palais, Rensi reprit le bateau et rentra chez lui.
Le Grand Intendant des Domaines royaux se réjouit de retrouver Kouéninpou l'oasien qui l'attendait à l'embarcadère. - Note tout ce qu'il dira, murmura-t-il au scribe qui l'accompagnait toujours, fidèle comme son ombre. - Grand Intendant, Mon Seigneur, le plus Grand des Grands, le plus Riche des Riches, écoutez-moi ! cria le paysan dès qu'il aperçut Rensi. Est-il possible qu'un puissant vole le voyageur solitaire ? Un puissant qui possède tout ce qu'il faut dans sa maison : du pain, de la bière et des tissus en abondance. Le mal est-il donc en lui ? Oublie-t-il qu'un homme riche meurt aussi bien qu'un pauvre comme moi. Se souvient-il... - Insolent paysan, je n'oublie rien. Mais, toi ne crains-tu pas que mes hommes ne t'arrêtent ? interrompit le Grand Intendant malgré les ordres royaux. - Ô le plus Grand des Grands ! poursuivit le bavard et le courageux Kouéninpou. Soyez un refuge pour les malheureux. Soyez juste. Ô vous qui devez aider celui qui se noie, venez à mon secours. Souvenez-vous qu'une bonne action est toujours récompensée. Mais faites attention car, pour le moment, la vérité et la justice s'éloignent de vous. Rappelez-vous que... - Prends garde, menaça Rensi agacé d'écouter sans mot dire les leçons de morale d'un simple paysan. - Seigneur, regardez ! Aujourd'hui celui qui doit mettre à l'aise étouffe, celui qui doit distribuer des biens dépouille, celui qui doit punir le mal le fait ! Ô Grand Intendant, pourquoi agir ainsi ? Vous êtes fort et puissant, vous avez du pain pour vous rassasier, de la bière pour vous enivrer, mais vous n'avez aucune pitié... Si vous laissez libre le voleur, qui chassera le mal ? - Prends garde, hurla Rensi. - Mon seigneur, négligerez-vous mon affaire ? Rendez justice, car...
Le soleil se couchait lorsque Rensi, suivi de son scribe, s'éloigna sans répondre à Kouéninpou qui parlait encore et toujours. Pourtant, au fond de son cœur, il savait que le paysan avait raison. Sans les ordres royaux, il aurait déjà réglé cette affaire. Mais il ne le pouvait pas. - As-tu bien tout noté ? chuchota-t-il à son scribe. - Oui, Maître. - Cet audacieux et amusant discours de Kouéninpou saura distraire Pharaon, se réjouit-il. Il reviendra bientôt me voir.
Effectivement, quelques jours plus tard, l'oasien s'arrangea pour croiser le chemin du Grand Intendant. Sautant sur l'occasion, il le supplia de juger son affaire pour la troisième fois. - Ô mon Maître, condamnez le voleur, protégez le malheureux, punissez celui qui mérite d'être puni, implora Kouéninpou. Cependant, prenez garde de l'Éternité qui approche, du jour du jugement dans l'Au-delà ! Du jour de VOTRE jugement... Ne répondez pas au bien par le mal... - … - … Vous gardez le silence, mais je ne me tairai pas ! Mon discours grandit plus vite que la mauvaise herbe, et la mauvaise herbe pousse mieux que le bon blé. Non, vraiment, je ne me tairai pas. Tant que je pourrai parler, je parlerai. - Hum, grogna Rensi en un raclement de gorge. - Garderez-vous toujours le silence ? - … - Soit, mais ainsi le mal se développera comme les mauvaises herbes. Vous qui devez entendre, vous n'entendez rien. Où ce silence vous conduira-t-il ? Voyez-vous...
Et Kouéninpou, l'intarissable oasien, continua longtemps encore. Il répéta les mêmes demandes sous des formes différentes. Le scribe écrivait aussi vite et aussi bien que possible. Muet mais attentif, le Grand Intendant s'amusait en lui-même de ces paroles effrontées. Bientôt, il soupira, l'écouta encore et enfin s'impatienta. Alors, d'un geste de la main, il appela deux gardes. Le fouet à la main, les hommes approchèrent et frappèrent le paysan. [b] - Vous faîtes encore fausse route, continua Kouéninpou en se protégeant des coups autant que possible. Votre visage est aveugle à ce qu'il voit, sourd à ce qu'il entend... - Vas-tu te taire, hurlèrent les gardes en tapant plus fort... - Ô Grand Intendant aveugle et sourd ! Vous êtes comme un policier qui prend ce qui ne lui appartient pas, comme un gouverneur qui vole... Vous êtes un modèle pour celui qui agit mal. Vous êtes... Sous les coups, l'oasien continua à réclamer justice. Rien ne put le faire taire. Quand, fatigués de frapper, les deux gardes l'abandonnèrent, il s'effondra dans la poussière du chemin, frotta son dos meurtri, ses membres endoloris, et gémit. Il était seul.
Lorsque, peu de temps après, Kouéninpou aperçut le Grand Intendant sortant du temple, il s'arrangea pour lui barrer le chemin. Il ne vit pas que Rensi se réjouissait de cette rencontre. - Ô puissant Seigneur, permettez-moi de défendre mon bon droit, lui dit-il prêt à plaider sa cause une quatrième fois. Soyez bienveillant ! Cherchez la vérité afin que le malheur ne vous atteigne jamais. Car, si vous négligez une affaire, elle empirera. Vais-je passer mon temps à vous supplier ? Et Kouéninpou, l'intarissable oasien, répéta les mêmes demandes sous des formes différentes. Le scribe écrivait aussi vite et aussi bien que possible. Muet et attentif, le Grand Intendant s'amusait en lui-même de ces paroles effrontées. Bientôt, il soupira, l'écouta encore et enfin s'impatienta. Alors, sans répondre, il s'éloigna.
Rien n'empêcha le paysan de venir se plaindre une cinquième fois. Il supplia le Grand Intendant de juger son affaire, réclama ses ânes et ses marchandises, rappela que le puissant se doit de protéger le faible… - Mon Seigneur, conclut-il, ne prenez pas à un pauvre ce qu'il possède. Pour un misérable comme moi, mes biens sont toute ma vie : celui qui me vole m'étouffe ! Il me tue. Vous avez été nommé pour juger, pour punir, mais en fait vous aidez le voleur. Et Kouéninpou, l'intarissable oasien, répéta les mêmes demandes sous des formes différentes. Le scribe écrivait. Muet et attentif, le Grand Intendant s'amusait en lui-même de ces paroles effrontées. Bientôt, il soupira, l'écouta encore et enfin s'impatienta. Alors, il lui tourna le dos et partit sans un mot. - Grand Intendant ! Ne soyez pas si lent, agissez ! hurla Kouéninpou en haussant le ton pour être entendu le plus longtemps possible. Vous êtes instruit. Vous êtes habiles. Vous...
Les jours suivants, certains pensèrent qu'il se découragerait, mais pas du tout. Le courageux paysan réclama justice une sixième, une septième, une huitième, une neuvième fois. Il discourut pendant des heures. Il redit sans cesse la même chose trouvant des expressions nouvelles pour parler de sa misère, de la ruse de son voleur, de l'indifférence des puissants et des conséquences de l'injustice dans le monde des morts comme dans celui des vivants. Devant le Grand Intendant toujours silencieux, il s'indigna, amusa, provoqua, expliqua. - Ô mon Maître, soyez bienveillant envers l'homme qui vous appelle pour juger sa juste cause. Je vous implore une dernière fois, supplia Kouéninpou debout sur la rive du Nil. Vous ne m'écoutez pas. Seul votre scribe note mes paroles. Puisqu'il en est ainsi, je vais au plaindre au dieu Anubis. Sans mes biens, je vais mourir et, quand je serai dans le Monde des morts, j'expliquerai au dieu comment Nemtynakht me vola et comment la justice humaine m'oublia. Cela dit, Kouéninpou désespéré se tut et s'éloigna lentement. - Gardes ! Ramenez le de gré ou de force, ordonna le Grand Intendant bien décidé à ne pas le laisser aller bien loin. Lorsqu'il les entendit courir après lui, le paysan eut peur d'être battu une seconde fois. Lorsqu'il les sentit l'empoigner brutalement, il trembla. Lorsqu'ils le traînèrent jusqu'au Grand Intendant, il pensa être puni pour son insolence et la vérité de ses paroles. « Je vais mourir », se dit-il. - Ne crains rien, oasien ! Le jour de ta mort n'est pas encore venu, le rassura Rensi. Je t'ai écouté ne gardant le silence que pour t'obliger à rester avec moi. - Puisqu'il en est ainsi, jamais plus je ne mangerai de votre pain ni ne boirai de votre bière, jura le paysan furieux. - Attends un peu et écoute-moi. J'obéissais aux ordres royaux comme mon scribe qui notait sur papyrus tes beaux discours. - Tout ce que j'ai dit ? s'étonna Kouéninpou. - Oui. Maintenant, il est temps que l'on porte ce rouleau de papyrus au roi afin que sa lecture réjouisse son cœur. Car Pharaon aime à être obéi. Quant à moi, je vais régler ton affaire. Gardes, allez chercher Nemtynakht.
Celui-ci fut immédiatement amené devant le Grand Intendant des Domaines royaux. Il fut interrogé tandis que les aides de Rensi dressaient une liste de ses biens : six esclaves, sans compter son orge, son blé, ses ânes, ses porcs, son gros et son petit bétail... Nemtynakht était un homme riche. Silencieux, attentif, l'oasien les regarda faire. Il attendit le verdict, le cœur battant. - Que la maison de Nemtynakht et tous ses bien te soient donnés, Kouéninpou ! Et que ce voleur travaille désormais pour toi, décida le Grand Intendant Rensi. - Ô mon Maître, merci. Vous anéantissez le mensonge, vous laissez venir la vérité, vous terrassez le mal, vous rendez justice... Alors, avec de belles phrases, l'éloquent paysan remercia le Grand Intendant comme lui seul pouvait le faire.
Quelques jours plus tard, l'oasien chargea ses ânes de pains, de bière et d'eau afin qu'il puisse manger et boire pendant son voyage ! Il n'oublia pas les beaux produits de la vallée obtenus en échanges de ses marchandises. Quand tout fut prêt, Kouéninpou se mit en route vers le nord. Il mena si bien ses ânes sur la piste du désert qu'il arriva, peu de temps après, chez lui. Sa femme et ses enfants l'attendaient dans leur petite maison de l'Oasis du Sel. Depuis ce jour, ils y vécurent heureux et ne manquèrent plus jamais de rien.
Sources :
Cette mésaventure est connue grâce à quatre papyrus qui se complètent l'un à l'autre, cependant aucun d'eux n'est postérieur à la XIIIe dynastie ( avant 1700 av. J.C. ).
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